Parfois on a besoin de faire une grosse bêtise pour se rendre compte qu’on était sur le mauvais chemin. |
« C’était une femme. » Les mots n’étaient pas sortis de mes lèvres que je les regrettais déjà. J’ai du me faire violence pour ne pas plaquer mes mains sur ma bouche et garder un visage impassible. Malheureusement, mes mots n’étaient pas passé inaperçus et l’agent de police se tourna vers moi.
« Qu’est ce que vous avez dit ? » Il avait très bien entendu, je pouvais le capter dans ses pensées, il espérait seulement capter une émotion, quelque chose qui lui prouve que je savais qui était à l’origine de la prise d’otage. Il doit y avoir une chance pour cent millions pour que l’on décide de braquer la banque au moment où vous allez y poser un chèque. Je n’avais jamais été chanceuse.
« J’ai dit que ce n’était pas un homme mais une femme. » Cela faisait déjà plus de deux heures que je me tenais assise dans un coin de la banque à répéter encore et encore ce que j’avais vu ou non. Et non seulement je m’ennuyais ferme mais en plus je voyais bien que les flics n’avaient aucune piste sérieuse et qu’il n’allait jamais retrouver les coupables.
« Comment est ce que vous savez cela ? » Il pensait que personne n’avait fait le moindre commentaire sur le deuxième braqueur, d’apparence parfaitement semblable au premier. Pour toute réponse, j’ai hoché les épaules. J’avais deux solutions, la première, avouer que je pouvais lire dans les pensées. Là aussi il y avait deux cas de figure, soit ils m’enfermaient sans détour dans un hôpital psychiatrique et me bourraient de médicaments, soit ils mettaient au point une sorte de test pour être certain que je ne mentais pas et m’entrainaient avec eux dans toutes leurs petites aventures. Et des maux, je n’aurai vraiment su lequel choisir, n’ayant aucune envie de mourir ou lire dans la tête de violeur ou terroriste jusqu’à la fin de ma vie. La deuxième solution consistait à amener la police à revoir, le plus discrètement possible, les potentiels suspects. Le regard perçant du policier que j’avais interpellé sembla me transpercer de part en part. Je ne savais plus vraiment ou me mettre et pendant une infime seconde, j’ai bien cru que j’allais tout simplement tout lui raconter avant de me reprendre.
« Si j’étais vous, j’enquêterai du côté des Dinweedie, ils ont eu quelques problèmes d’argent récemment. » J’avais parlé assez bas pour que seul lui puisse m’entendre. Dans ses yeux tout comme dans ses pensées, je pouvais suivre le raisonnement qu’il se faisait. Pour une raison que j’ignorais, tout autant que lui, il me croyait. Il ne savait pas vraiment comment je savais cela et comptais bien faire des recherches sur moi mais il allait suivre mes directives, ne serait-ce que pour être fixé.
« Maintenant veuillez m’excuser mais j’ai déjà loupé toute une matinée de travail, j’aimerai autant ne pas me faire virer. » Sans un mot de plus, je me suis levée, j’ai traversé la banque pour enfin respirer l’air pur. C’est seulement une fois assise dans le taxi que j’ai remarqué que mes mains tremblaient.
Mais la vérité c’est que ça fait mal, alors on ment. |
« Sookie Daniels. » Un sourire étira mes lèvres tandis que je glissais mon marque page entre deux feuilles avant de refermer mon livre. Lire n’était pas quelque chose que j’affectionnais vraiment, voir pas du tout mais c’était une bonne couverture lorsque j’avais envie de faire un tour dans les pensées alentours. C’était un luxe que je me permettais de temps en temps, consciente de l’intrusion dans leur vie privée. C’est pourquoi j’avais capté la signature mentale de ce flic sans même avoir levé les yeux sur lui. Je savais aussi qu’il trouvait que j’avais de belles épaules et un sourire qui m’aurait donné le bon dieu sans confession, selon lui. Réflexion qui ne fit que le renforcer, par ailleurs. Il prit place de l’autre côté de la table et poussa une tasse devant moi. Un cappuccino sans chantilly, il savait que je n’aimais pas ça. En me le donnant, il voulait que je comprenne qu’il avait fait des recherches sur moi, de manière très poussé puisqu’il avait même quelques informations sur mes habitudes alimentaires.
« Merci. » Je ne connaissais pas son nom ainsi je ne pouvais pas lui rendre la pareille et me contentais d’être polie. Il s’attendait légèrement à me voir paniquer et mon calme n’était pas pour lui plaire mais je n’avais aucune envie de faire de quelconques efforts.
« Sans chantilly, deux sucres. » J’avais anéanti tous les beaux discours qu’il avait préparé en restant totalement de marbre à son intimidation, tellement qu’il alla jusqu’à la verbaliser. L’envie de rire me prit mais dans un effort considérable, je me suis contenue. Après tout il s’était donné du mal, tellement que j’avais presque envie d’entrer dans son jeu. Presque.
« Merci. » Ne sachant pas vraiment quoi ajouter d’autre, j’ai réitéré mon remerciement et attrapé la tasse pour boire une gorgée du breuvage.
« Qui êtes vous ? » Sa question me prit au dépourvue, ce qui arrivait rarement étant donné mon petit don. Je fronçais les sourcils tout en essayant de me concentrer sur mes pensées pour comprendre où il voulait en venir. Ne trouvant rien de bien méchant, j’ai finit par répondre.
« Sookie Daniels, mais il me semble que vous le saviez déjà. » Etant donné que c’était la première chose qu’il m’avait dite, cela tombait sous le sens. Par ailleurs, ma réponse sembla l’agacer puisqu’effectivement, il avait déjà cette information.
« Comment est-ce que vous saviez ? » Une chose était certaine, il ne perdait pas de temps et n’y allait pas par quatre chemin. J’ai rapidement apprit qu’il avait fini par enquêter les Diweedie et qu’il les avait arrêté la semaine dernière en possession du butin.
« Ils sont en prison, c’est le plus important, non ? » Bien entendu, il trouvait cela important mais le mystère que j’étais pour lui semblait avoir prit beaucoup de place dans sa vie.
« Non. » Il était franc, c’était une qualité que je lui enviais pour dire vrai et que je trouvais d’autant plus respectable que j’étais certaine qu’il ne mentait pas.
« J’aimerai juste comprendre. » Une nouvelle fois, parfaitement honnête, bien qu’ayant légèrement mentit par omission, ce qui n’était au demeurant pas bien grave.
« Je suis une femme mystérieuse. » Un léger sourire en coin, j’ai simplement haussé les épaules et mit mes mains en coupe autour de la tasse pour les réchauffer. Je ne savais pas vraiment comment agir avec lui. Je savais qu’il n’avait rien dit sur le petit coup de pouce que je lui avais gentiment offert et qu’il avait fait ses recherches seuls sans impliquer personne. Je percevais aussi les théories qu’il échafaudait sur moi, il hésitait notamment entre agent de la cia et fille de mafieux, bien qu’il ne me voyait dans aucun de ces rôles.
« Je ne vous le fais pas dire. » Il observait mon regard à la recherche du moindre indice, la moindre inflexion qui puisse lui indiquer quelque chose. Si mon visage restait de marbre, une pensée fugace lui échappa et me fit légèrement tiquer. J’avais très vite découvert que le sexe est une pensée courante chez les êtres humains, autant chez les femmes que chez les hommes qui plus est. Mais lui n’avait pas pensé à me mettre dans son lit, il s’était simplement fait la réflexion que je devais avoir les lèvres douces, très agréables à embrasser. C’était pour le moins inattendu et je n’avais pas pu empêcher mes yeux de s’écarquiller légèrement. J’ai donc pu suivre en direct les répercussions de mon impudence et l’entendre penser que peut-être, il existait des gens dotés de certains dons, que ce n’était peut-être pas seulement un univers de fiction. Et j’ai comprit qu’il n’aurait de cesse de me harceler jusqu’à ce que je finisse par lui avouer la vérité.